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Déc 20, 2015 | Art & Culture | 0 commentaires

Tahar Djaout, le souvenir impérissable d'un immense poète

par | Art & Culture

Un homme aux qualités humaines rares. Un poète hors-pair. Un romancier et un nouvelliste qui avait produit des oeuvres de haute facture. Ravi aux siens, par les barbares, en pleine maturité littéraire, Tahar Djaout laisse une production imposante.

Il y a eu d’abord le poète. A Bab Ezzouar où il est encore étudiant en mathématiques, Tahar Djaout écrit de la poésie. De la bonne poésie.

 » Te perdre/C’est retrouver le néant des sables/Avec ses os de seiches obstruant ma bouche/C’est retrouver le jour encombré d’épluchures/Jonché de squelettes épineux/Toi perdue/
Mes mains se videront de tout ce qui les faisait gémir ou trembler/Mes lèvres n’atteindront plus aux voiles du ciel frais/Les épines des rosiers ne serviront qu’à composer au monde/Un visage barbelé. », écrit Tahar Dajout dans Mon amoureuse.

L’étudiant de Bab Ezzouar ne tarde pas à publier: en France et au Canada. Les poèmes de l’enfant d’Oulkhou ne passent pas inaperçus.
« Embrayeurs des nuées/Poètes et le Temple des Clartés/ bâti de vos vertèbres/donnera-t-il enfin/le Pain que nous cherchons ?/j’entends monter de vous/la rumeur des fleuves/et sourdre le sein/de vos squelettes têtus/ le refus de hisser/le pavillon du silence », souligne l’auteur de l’Expropié, un premier roman plein de révoltes multiples et dont on comprend tout de suite
l’influence du romancier marocain, Mohamed Khair Eddine.

« Régler la parade des squelettes/Refaire les dates à sa guise/Retoucher les biographies/Effacer le
précédent/Le patriotisme est un métier. », fait remarquer Tahar Djaout dans un court poème, toujours d’actualité.

La consécration vient avec la publication aux éditions du Seuil, à Paris en 1984, des Chercheurs
d’os.  » Le sujet préféré et inépuisable des habitants de ce pays c’est la bouffe. Depuis que nous sommes devenus souverains et que nous mangeons à notre faim, beaucoup de personnes ont acquis des comportements imprévisibles et déroutants. Elles ont cessé de se
rendre visite entre elles, de se prêter le moindre ustensile ménager – tout en renonçant du même coup à entourer leurs actes et leurs biens de la discrétion la plus élémentaire. Jadis les traditions d’honneur et de bon voisinage exigeaient que l’on partageât toute denrée rare (viande, fruits) avec ses proches et son voisin ou alors de la rentrer chez soi avec de telles précautions que personne ne pût en déceler le moindre indice. Maintenant, au contraire, c’est l’arrogance, la provocation. C’est à qui entassera le plus de déchets devant sa porte, c’est à qui pendra à ses
fenêtres le plus de choses coûteuses et tentantes. Les gens possèdent désormais des biens et des objets dont ils ne pouvaient même pas rêver jadis : appareils tout en brillances et en angles droits qui servent à faire de la musique, du froid, de la chaleur, de la lumière, de la pénombre, du vent, de l’équilibre stable et instable, des images fixes ou mouvantes. », raconte Tahar Djaout dans cette fiction touchante et pleine de rebondissements.

« Nous sommes un peuple où la vie active débute très tôt: berger à quatre ou cinq ans,
laboureur à treize, père de famille à dix-sept ou dix-huit. A l’âge de trente-cinq ans on cesse d’aller
la tête découverte et de porter des pantalons «européens » : on arbore un chèche et les vêtements amples du pays. On passe dans le camp des hommes qui n’attendent plus rien de la vie, qui peinent durant la journée aux champs pour, le soir, aller discuter à la mosquée avec les vieillards avant la prière commune. », ajoute Tahar Djaout dans les Chercheurs d’os.

Puis d’autres romans suivent: l’invention du désert et les Vigiles. Tahar Djaout continuera à raconter les territoires paisibles de l’enfance. « L’ère démocratique a bouleversé bien des donnees et ébranlé bien des certitudes. Je me suis souvent demandé quelle idée peuvent retrospectivement avoir du système qu’ils ont servi le policier discretement en faction aux environs de la maison de Mouloud Mammeri, le flic affecté à la surveillance de Kateb Yacine, les
« tacherons » chargés de torturer Bachir Hadj Ali, les commis (faux magistrats, gardiens de prison…) qui ont mené la vie dure à des hommes donnés aujourd’hui comme exemples de droiture, de patriotisme, de conviction démocratique. C’est généralement à l’occasion de leur mort que nous
avons enfin appris ce que des hommes comme Mouloud Mammeri, Kateb Yacine, Bachir Hadj Ali ont réellement donné à l’Algérie, et même à l’humanité entière. Il m’est arrivé d’imaginer les différents factionnaires et commis saisis d’un profond désarroi en s’interrogeant tout à coup, dans un éclair de lucidité (car je pense que c’est un état qui doit les visiter de temps en temps): nous avons donc traqué et persécuté tous ceux qui faisaient l’honneur de ce pays? », se demandait Tahar Djaout dans un article de l’hebdomadaire Algérie-Actualité.

Le poète n’est plus mais le temps n’a aucun effet sur l’aura d’une oeuvre magique. C’est le propre des grandes créations.

Youcef Zirem| Source

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